Depuis la pandémie de Covid-19 qui a frappé le monde en 2020, nombreux sont les habitants des villes à avoir déménagé vers les espaces ruraux, entraînant une augmentation des tensions de voisinage et de plaintes entre voisins. En avril dernier, une loi a été adoptée pour mieux encadrer ces situations. Que change la loi ?
Qu’est-ce qu’un trouble du voisinage ?
Un trouble du voisinage est une perturbation causée par une personne à l’égard de ses voisins, affectant leur qualité de vie ou leur jouissance de leur propriété. Ces troubles peuvent être de diverses natures, englobant des nuisances sonores, olfactives, visuelles, ou encore des empiètements physiques :
- Nuisances sonores : bruits excessifs causés par des fêtes, des travaux de rénovation, des animaux domestiques, des appareils électroménagers, etc.
- Nuisances olfactives : odeurs désagréables provenant par exemple de poubelles mal entretenues, de fumées, de cuisine, ou d’activités industrielles.
- Nuisances visuelles : présence d’objets inesthétiques, construction obstruant la vue, manque d’entretien des espaces verts, etc.
- Troubles de jouissance : intrusion de racines ou branches d’arbres dans la propriété voisine, écoulement d’eau, empiètement de constructions, etc.
- Nuisances dues aux animaux : bruit, odeurs, comportements agressifs ou intrusifs d’animaux domestiques.
La jurisprudence de l'affaire du “coq Maurice”
L’affaire du coq Maurice est un cas emblématique de trouble du voisinage en France, mettant en lumière les tensions entre les traditions rurales et les attentes des nouveaux résidents dans les zones rurales. L’affaire se déroule sur l’île d’Oléron, où Corinne Fesseau, propriétaire du coq Maurice, fait face à la plainte d’un couple de voisins retraités. Ces derniers se plaignent du chant matinal de Maurice, considéré comme une nuisance sonore.
En 2017, les voisins ont déposé plainte contre Corinne Fesseau pour trouble du voisinage. L’affaire a été portée devant le tribunal correctionnel de Rochefort et a rapidement attiré l’attention des médias et du public, devenant un symbole de la préservation des traditions rurales. En septembre 2019, le tribunal a rendu son jugement, autorisant Maurice à continuer de chanter. Le tribunal a estimé que le chant du coq faisait partie de l’environnement naturel de la campagne et n’était pas constitutif d’un trouble anormal du voisinage.
La décision de justice a été perçue comme une reconnaissance des bruits traditionnels de la campagne, tels que le chant des coqs, comme faisant partie intégrante du patrimoine rural français. L’affaire Maurice a souligné la nécessité de trouver un équilibre entre les attentes des nouveaux résidents, souvent des citadins, et les traditions locales des zones rurales. Bien que chaque cas de trouble du voisinage soit unique et évalué en fonction de ses circonstances spécifiques, l’affaire Maurice a créé un précédent en faveur de la tolérance des bruits ruraux traditionnels.
La notion de “trouble anormal” clarifiée
Le nouvel article 1253 du Code civil indique que la responsabilité de la personne à l’origine d’un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage “n’est pas engagée lorsque le trouble anormal provient d’activités, quelle qu’en soit la nature, existant antérieurement à l’acte transférant la propriété ou octroyant la jouissance du bien ou, à défaut d’acte, à la date d’entrée en possession du bien par la personne lésée”.
Cela signifie que la responsabilité de l’auteur peut être écartée si le trouble existait avant l’installation de la personne qui se dit lésée. Cette dernière peut malgré tout se plaindre des nuisances, il reviendra donc à l’agent de contrôle de déterminer la conclusion de l’enquête et de décider de la responsabilité, ou non, du voisin. Il est évidemment conseillé d’essayer de trouver un accord à l’amiable.